(Trois interlocuteurs)

— La génétique vous intéresse?
— Mais tu es généticienne?
— Mais non, pas du tout, et toi?
— Non, non.
— Moi ce qui me gêne dans la génétique, c'est que j'ai l'impression d'être indiscrète, de trahir l'auteur, d'aller dans la cuisine plutôt que de savourer le plat superbe qu'on vient de me servir.
— Mais non, pas du tout.
— Oui, pas du tout. Avec Proust on est déjà dans le salon...
— Oui, un salon pas très rangé où le ménage n'est pas fait très souvent mais le salon tout de même.
— On n'atteint jamais la cuisine. La cuisine n'existe pas, elle est hors d'atteinte.




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Complément le 13 mars 2015 : après cinq ans il y a prescription. (Et puis je doute que ce billet soit référencé très haut par Google; seuls les fidèles le liront à l'occasion).
Cette conversation a eu lieu à la pizzeria après une matinée sur Claude Mauriac à l'ENS dans le cadre d'une matinée sur l'autobiographie. J'y ai rencontré pour la première fois Jean Allemand. (Je représentais Patrick qui s'était cassé le pied après la mort de son beau-père). J'étais en face de Nathalie Mauriac Dyers (quelle émotion de manger une pizza en face d'une professeur religieusement écoutée au Collège de France!), à côté d'elle se trouvait Philippe Lejeune, à côté de moi Jean Allemand.
Philippe Lejeune qui commentait Robbe-Grillet et Sarraute s'est tu en apprenant que j'avais un blog.