La photo qui a remporté le 1er prix du concours l'aviron au féminin est la 107, et je la trouve tellement mauvaise, tellement représentative de la vision stéréotypée de certains hommes (de ce que doit être une photo gagnante représentant des femmes dans un monde sportif) que cela m'a un peu découragée d'en parler plus tôt. Il y avait tant de belles photos, axées sur la joie, l'effort, la technique, la nature... et choisir un talon haut sur une rame! Vraiment n'importe quoi, rien qu'à ce choix il me semble pouvoir faire le portrait robot de ceux qui l'ont choisie (sachant qu'il y avait sans doute beaucoup trop de photos et trop peu de votants pour qu'il soit réellement possible de départager les photos par un vote).


Voici donc ma photo préférée. Paradoxe qui me ressemble, je n'ai pas voté pour elle, car je ne l'ai vue qu'après avoir voté. J'aime cette photo parce que l'idée est à la fois raffinée et amusante: ce n'est qu'un jeu, une mise en scène, que la compétition (couleur de l'équipe) permet de mettre en évidence.
Elle représente ce que je pense de l'élégance: un superflu qui établit une complicité entre l'acteur et le spectateur, un plaisir offert et un plaisir reçu.





En un j'ai voté pour celle-ci, par nostalgie, parce que c'est le souvenir que j'ai de nos retours sur la Loire en automne ou en hiver, dans le soleil couchant.





En deux pour celle-ci, parce qu'elle est terriblement vraie, entraînant des sentiments ambivalents: «Chic, je ne porte pas, zut, je ne porte pas». C'est le condensé de tout le débat sur les règles de politesse: merci de me porter mes paquets (c'est lourd, je suis "petite et faible" (private joke)), vous ne devriez pas porter mes paquets (je peux me débrouiller toute seule, arrêtez de me materner).





Et celle-là en trois, parce que je ne pouvais tout de même pas ne pas choisir une photo qui représente ce que veut dire ramer ensemble. «Ensemble», le mot et sa musique me sont si fort gravés dans la mémoire que j'en rêve. Se dissoudre individuellement dans la glisse du bateau, abandonner toute velléité de prééminence et savoir que c'est à ce prix que le bateau pourra glisser au mieux, sans à-coups.
Quand se pose la question: «Si c'était à refaire...», je sais qu'il y a une chose que je ne ferai pas: abandonner l'aviron au lycée. Je sais pourquoi je l'ai fait, c'était stupide, et c'est l'un de mes plus grands regrets (pas pour le sport, non, pour l'ambiance et pour René).